Mark Moss établit une comparaison saisissante entre les entreprises détenant du Bitcoin en trésorerie et les industriels du début du XXe siècle qui investissaient discrètement dans l’électricité tout en exploitant encore le gaz. Cette stratégie d’arbitrage historique pourrait-elle révéler l’opportunité d’investissement la plus évidente de notre époque ?

L’Analogie Historique : Des Usines À Gaz Aux Réserves Bitcoin
L’analyse de Mark Moss repose sur une comparaison historique frappante avec les industriels visionnaires du début du XXe siècle. Dans les années 1910, certains propriétaires d’usines maintenaient leurs chaînes de production alimentées au gaz tout en investissant discrètement dans l’infrastructure électrique naissante. Cette stratégie apparaissait alors redondante et coûteuse aux observateurs de l’époque.
Pourtant, ces pionniers utilisaient intelligemment les profits de l’ancienne technologie pour financer la nouvelle. Ils comprenaient qu’une transition technologique majeure se profilait et positionnaient leurs entreprises en conséquence. Cette approche leur permit de traverser sereinement l’une des révolutions industrielles les plus évidentes de l’histoire moderne.
Selon Moss, les entreprises treasury Bitcoin reproduisent exactement ce modèle aujourd’hui. Elles exploitent les mécanismes traditionnels de dette et d’equity pour construire systématiquement leur exposition au Bitcoin. Cette stratégie d’extraction de valeur du système financier existant vers les actifs numériques constitue, dans ses mots, « l’arbitrage le plus évident de l’histoire ».
Cette analogie soulève une question fondamentale : ces entreprises anticipent-elles une transition monétaire comparable à la révolution électrique, ou leurs dirigeants surestiment-ils la portée disruptive du Bitcoin face aux infrastructures financières établies ?

Avantages Concurrentiels Des Entreprises Treasury Bitcoin Face Aux Acteurs Traditionnels
Au-delà de cette vision historique, ces entreprises disposent d’atouts structurels concrets qui les distinguent des corporations classiques. Contrairement aux sociétés traditionnelles limitées par leurs activités opérationnelles, les entreprises treasury Bitcoin peuvent lever des capitaux spécifiquement dédiés à l’accumulation d’actifs numériques et ajuster leurs stratégies de bilan en temps réel.
Cette flexibilité financière leur permet de déployer des mécanismes sophistiqués : émission d’obligations convertibles, effet de levier calibré, et hedging sélectif sur leurs positions Bitcoin. Alors qu’une entreprise tech classique subit passivement les fluctuations de marché, ces véhicules d’investissement peuvent transformer la volatilité en opportunité grâce à des stratégies de dollar-cost averaging amplifiées.
Moss souligne que cette approche hybride combine la discipline financière traditionnelle avec le potentiel disruptif des actifs numériques. Les entreprises peuvent ainsi exploiter les corrections Bitcoin pour renforcer leurs réserves, tout en maintenant des flux de trésorerie via leurs activités annexes ou leurs levées de fonds.
Cette capacité d’adaptation rapide contraste avec les géants technologiques, contraints par leurs cycles d’innovation longs et leurs investissements R&D massifs. En théorie, le modèle treasury Bitcoin devrait donc générer des performances supérieures aux actions tech traditionnelles.
Pourtant, les valorisations actuelles racontent une histoire différente, révélant un fossé béant entre potentiel théorique et reconnaissance du marché.

Décalage De Valorisation : Des Multiples Sous-Évalués Malgré La Performance Bitcoin
Cette déconnexion entre théorie et marché s’illustre parfaitement dans les métriques de valorisation actuelles. Alors que le S&P 500 affiche un ratio cours/bénéfices moyen de 30x, les entreprises comme Strategy s’échangent à seulement 1,6x la valeur de leurs réserves Bitcoin – un écart de valorisation spectaculaire qui interroge.
Le paradoxe s’accentue quand on observe la performance récente : Bitcoin a franchi les 24 000$ en août 2025, établissant de nouveaux sommets historiques. Pourtant, les actions des entreprises treasury accusent un retard flagrant, certaines évoluant même en territoire négatif malgré l’appréciation de leur actif sous-jacent principal.
Cette divergence s’explique en partie par les pressions vendeuses massives qui pèsent sur le secteur. Les liquidations ont totalisé plus d’un milliard de dollars, accompagnées de sorties d’ETF Bitcoin atteignant 90 millions de dollars. Ce climat de défiance contraste avec l’optimisme des analystes comme The Bitcoin Therapist, qui qualifie cette situation de « pas une chance : le marché se trompe ».
Les investisseurs institutionnels semblent donc refuser d’attribuer une prime de croissance à ces véhicules d’investissement, les traitant plutôt comme de simples proxies décotés de l’exposition Bitcoin. Cette réticence soulève une question fondamentale sur la nature réelle de cet écart de valorisation.

Question Cruciale : Erreur De Pricing Ou Reconnaissance Des Risques Réels
Cette divergence de valorisation cristallise un débat fondamental qui divise analystes et investisseurs. D’un côté, Mark Moss maintient que ces entreprises appliquent un modèle historiquement éprouvé : utiliser l’infrastructure actuelle pour financer la transformation de demain. De l’autre, le marché refuse obstinément d’accorder les multiples de croissance traditionnels à ce secteur.
La réticence des investisseurs institutionnels soulève deux hypothèses contradictoires. Soit le marché commet une erreur de pricing massive, incapable de saisir le potentiel disruptif de ces véhicules hybrides. Dans ce cas, l’écart de valorisation représenterait une opportunité d’arbitrage historique, comme le suggère l’analogie avec les pionniers de l’électrification industrielle.
Soit les investisseurs perçoivent des risques structurels que les défenseurs du Bitcoin minimisent délibérément. La volatilité extrême des cryptomonnaies, l’incertitude réglementaire et la concentration des risques sur un actif unique pourraient justifier cette prudence. Les liquidations récentes de plus d’un milliard de dollars témoignent de cette fragilité systémique.
La validation ou l’infirmation de cette théorie dépendra largement des performances futures de ces entreprises lors des prochains cycles de marché. Seul le temps déterminera si cette stratégie treasury constitue réellement l’arbitrage du siècle ou une illusion coûteuse portée par l’euphorie spéculative.